Liliane
Quand l’éclat de son regard s’éteint
Cette jolie petite fille de 10 ans est vive et souriante, même si comme nombre d’enfants de son âge, elle montre une certaine timidité lorsqu’il s’agit de répondre à quelques questions. Elle est arrivée à Douala en 2017, il y a plus d’un an, avec sa mère. Dans son village d’origine de la région du Sud-Ouest, elle a dû, comme nombre de ses camarades, abandonner l’école. Cette coupure aura duré près d’une année scolaire. Sa scolarisation à Douala est salvatrice pour elle. Martin, son enseignant, est d’ailleurs assez fier de pouvoir dire qu’en à peine plus d’un trimestre, elle a rattrapé une bonne partie de son retard. Elle nous raconte « j’étudie l’anglais, mais également le français, ce qui est important ».
Lilian sourit et s’ouvre. Puis elle s’adonne à la séance photos comme à un jeu, prenant la pose avec un peu d’espièglerie dans le regard. Un regard d’enfant qui va vite s’assombrir.
Lorsqu’elle doit évoquer ses parents, elle se fait plus tendue. Son père est resté au village et elle n’a malheureusement plus de nouvelles. Elle explique qu’elle lui a parlé. Il y a longtemps. Très longtemps. « À Noël », nous dit-elle, son regard s’obstinant désormais à fixer le sol, avant de se lever vers nous à nouveau. « Pas ce Noël, celui d’avant » réussit-elle difficilement à articuler. Sa voix tremble, chevrote, ses épaules s’affaissent doucement, inexorablement. Et cette jolie lumière qui habitait son regard s’éteint en quelques secondes, remplacée par un voile sombre, empreint de la douleur si particulière de ceux qui ne savent pas ce qu’il est advenu des êtres aimés.