Haoua, 13 ans, rêve d’un foyer pour chaque enfant
Sous un arbre qui cache presque le soleil ardent et brulant de Houlouf, un petit village dans Logone et Chari, de nombreux enfants sont réunis et très concentrés dans une activité ludique. La consigne donnée par leurs encadreurs est de fabriquer à base d’argile un objet qui représente ce qu’ils souhaitent pour leur avenir. Malgré leur nombre important et les nombreux objets qu’ils fabriquent, il est difficile de ne pas remarquer la petite Haoua toute seule, l’air un peu fébrile qui semble ne pas bien maitriser ce côté artistique. Mais quelques temps plus tard, son œuvre est prête : il s’agit d’une marmite supportée par 3 grosses pierres sous laquelle il y’a du feu. A côté, quelques couverts et un animal de compagnie. Curieux de savoir ce que tout cela représente pour elle, elle répond : « un enfant a besoin d’un foyer, de pouvoir manger et être protégé. Lorsqu’on nous a demandé de fabriquer ce que nous aimerions avoir, j’ai pensé à une époque ou nous étions tous en famille, nous ne manquions de rien ou presque, ma maman avait la possibilité de nous faire des repas dans sa propre cuisine et nous avions notre chien. Aujourd’hui ce n’est plus très possible. Nous avons abandonné tous nos biens à cause de la guerre » nous dit-elle la mine un peu triste mais avec un air d’espoir.
Haoua comme beaucoup d’enfants présents à cette activité est une refugiée. Elle est originaire de Banki au Nigeria. Sa famille et elle ont fui ce village en 2015 pour trouver refuge a environs 300 Km au Cameroun dans ce petit village Houlouf. Là-bas, ils ont vécu ce qu’elle qualifie de « moments très douloureux et traumatisants ». Aujourd’hui, avec sa maman et ses frères elle a retrouvé à Houlouf, une communauté d’accueil de personnes réfugiées et déplacées dans l’extrême nord du Cameroun. Elle se souvient encore de ces nuits où a cause des coups de feu, ses frères et elles étaient contraints de se serrer l’un contre l’autre sous le lit implorant Dieu pour que le matin arrive et qu’ils soient toujours en vie.
Grâce au soutien du Japon, l’UNICEF à travers son partenaire CLIRA (Children life in rural area) l’a identifiée parmi les enfants de 10 à 14 ans ayant vécu des traumatismes du fait des exactions de Boko Haram afin qu’ils bénéficient d’un appui psychosocial. Au mois quatre fois par semaine, dans les espaces sécurisés aménagés pour les enfants depuis trois mois, Haoua et les autres 400 enfants enrôlés dans ce programme assistent à plusieurs activités variées parmi lesquelles, les causeries éducatives suivies des sensibilisations sur diverses thèmes, les activités récréatives et ludiques. Ces activités les mettent à l’abri des besoins élémentaires et développent en eux la notion de solidarité, le vivre ensemble et contribuent à la prévention des enlèvements, la mauvaise compagnie, les ballades inutiles, la violence et l’exploitation.
Haoua aujourd’hui parvient à sortir de sa timidité et même si ce qu’elle a vécu il y’a quatre ans a encore des séquelles, elle se sent plus épanouie. « Avant je n’avais pas d’amis, je n’aimais pas rester ou il y’avait beaucoup de personnes mais maintenant je ne voudrais pas manquer la moindre occasion de venir ici à l’espace, jouer avec les autres et écouter les conseils de nos encadreurs. Je reprends une vie presque normale. Je me sens utile » nous confie-t-elle. Elle a repris goût à l’école grâce au programme d’apprentissage mis en œuvre dans ces espaces sécurisés pour les enfants. Mais à cause du manque de moyens, elle est obligée de vendre de l’eau pour aider sa mère à nourrir la famille. Elle souhaiterait avoir une scolarisation normale et construire une maison avec une grande cuisine pour bien nourrir sa famille et ses enfants dans le futur.